Tout voyage ne vaut que s'il est partagé...
Après quelque 30 000 km parcourus en bus, taxi, bateau, moto, tuk-tuk, camionnette et à cheval, le dépaysement est complet.
Les paysages se succèdent, superbes et infiniment variés. Les visages et les regards se gravent dans la mémoire du visiteur.
Invitation au voyage, à l'évasion et à la découverte, cet ouvrage nous emmène en Asie, continent chargé de légendes et d'histoire, tant rêvé par les colonisateurs et les missionnaires, les aventuriers et les touristes. De ce berceau de cultures et de
traditions séculaires, il nous en rapporte un kaléidoscope d'images, de sensations et d'expériences.
Mais ce livre propose aussi, au-delà du pittoresque qu'évoque en chacun de nous le rêve du lointain, une réflexion globale et critique sur l'exportation de notre modernité et la rencontre ambiguë des cultures occidentales et asiatiques.
Explorer un pays encore préservé comme le Laos, succomber au charme exotique et aux divertissements de Bali ou découvrir le vrai visage de la Birmanie, Java ou Sumatra... Le hasard se vit au détour de chaque chemin, en croisant des regards, captivants, malicieux.
L'Asie, c'est simultanément la magie à l'état pur, une profonde richesse spirituelle, des jungles impénétrables, des plages paradisiaques, des îles exotiques et un héritage culinaire raffiné. Pourtant, l'Asie d'aujourd'hui ne nous attend pas, elle avance à grands pas vers son destin. Sur son chemin, peu à peu, ses traditions et ses cultures se perdent au profit de la «modernité».
Cet ouvrage s'offre comme un témoignage d'une époque bientôt révolue. Souvenir. Arrêt sur images. Passage.
De l'Asie du Sud-Est, en passant par la Chine et la Mongolie, cet album constitue un témoignage précieux de portraits, de scènes de vie et de paysages.
Photographies de Régis Colombo
Préface de Matthieu Ricard
Textes :
Aurélie Moeri
Hector Christiaen
Loïc Degen
Régis Colombo
SORTIE LE 12 OCTOBRE 2006
Impression en couleurs et 1 verni brillant sur les images et papier semi-mat
Format de 21 * 30 cm, 192 pages
VIDEO TV ici Téléjournal TSR 1 - Suisse - pour Portraits d'Asie
Après nous avoir fait découvrir les couleurs surprenantes du Sahara et la magie des rivages de Zanzibar, Régis Colombo s'est laissé guider par la lumière et nous transporte, par-delà son objectif, sur le continent asiatique.
Dessinateur de lumière, le photoreporter a enquêté sur la révolution de l'invisible, la séparation entre lisible et visible. Puis il a été captivé par la magie des lieux et, en une fraction de seconde, a réussi à capter au paysage, au regard du quidam, une partie d'eux-mêmes.
Dans cet univers poétique, les paysages défilent et perdent leurs repères. Cet égarement est une aubaine pour l'objectif de l'artiste, car il peut radiographier l'imaginaire au fond de son esprit. Antoine Blanc, journaliste.
Préface de Matthieu Ricard
Il faut savoir rendre hommage à la beauté sans la galvauder, partager avec les autres la force d'inspiration du moment, sans tirer avantage de la situation, sans dérober une image, allier la discrétion et l'humilité à la vivacité d'un regard toujours attentif. Il faut savoir s'effacer quand la situation l'exige et être présent lorsque survient le moment magique qui ne se reproduira plus.
Ce n'est pas une tâche aisée. La beauté varie en fonction de la manière dont chacun conçoit le plaisir esthétique. L'amour et l'altruisme sont beaux, tandis que la haine ou la jalousie sont laides. Les premiers embellissent un visage et les autres le défigurent. Mais la vraie beauté n'est-elle pas l'adéquation de l'être humain avec sa nature profonde?
Le photographe doit saisir l'instant avec la délicatesse de celui qui cueille une fleur de coquelicot sans détruire ses pétales, avec le ravissement de celui qui écoute résonner un verre de cristal sans en étouffer le son. Se mettre avec un coeur ouvert au diapason des êtres et comprendre intuitivement les limites de l'incursion personnelle.
On sait que le constant bombardement de mauvaises nouvelles dans les médias et la présentation de la violence comme ultime remède à tout conflit encouragent ce que les sociologues anglo-saxons ont appelé le «syndrome du mauvais monde» ( wicked world syndrome). Pour prendre un exemple, sur les trente-six expositions de photographies présentées à Visa pour l'Image à Perpignan en 1999, manifestation à laquelle j'ai participé en tant qu'exposant, deux seulement étaient consacrées à des sujets qui donnaient une idée constructive de la nature humaine. Les trentequatre autres illustraient notamment la guerre (les organisateurs avaient reçu les candidatures de plus de cent photographes traitant du Kosovo), les crimes de la Mafia à Palerme et les milieux de la drogue à New York. Ce «syndrome du mauvais monde» remet en cause la possibilité d'actualiser le bonheur. Le combat semble perdu d'avance. Penser que la nature humaine est essentiellement corrompue teinte de pessimisme notre vision de l'existence et nous fait douter du fondement même de la quête du bonheur, c'est-à-dire de la présence d'un potentiel de perfection en chaque être. Rappelons que selon le bouddhisme, la réalisation spirituelle est un épanouissement de ce potentiel. Il ne s'agit donc pas de tenter de purifier quelque chose de fondamentalement mauvais -- cela serait aussi vain que de s'évertuer à blanchir un morceau de charbon -- mais de nettoyer une pépite d'or afin d'en faire ressortir l'éclat.
Les images de Régis Colombo sont un hommage à la beauté intérieure des êtres et à la lumière scintillante des lieux. Elles inspirent la confiance et l'espoir dont nous avons tant besoin.
Matthieu Ricard vit au Népal à Shechen, le monastère de son maître, Dilgo Khyentse Rinpoche. Il a publié de nombreux livres et côtoie régulièrement le dalaï-lama, chef spirituel des Tibétains dont il est le traducteur français. Il se consacre principalement à une trentaine de projets humanitaires au Tibet, au Népal, au Bhoutan et en Inde.
Introduction d'Aurélie Moeri
Avant de fouler le continent asiatique, on s'est forcément laissé fasciner par les récits et les destins mémorables des grands voyageurs des XIXe et XXe siècles. Ludovic de Beauvoir, Pierre Loti, Alexandra David-Neel, Ella Maillart ou Nicolas Bouvier nous ont transportés dans les lointaines contrées d'Orient à travers leurs écrits. Là où la vie impose un autre rythme, où le sacré s'immisce dans le quotidien, où les sourires cachent dignement des histoires tragiques.
Lorsqu'on évoque l'Asie, ce sont d'abord des images d'hommes et de femmes qui viennent à l'esprit. On pense ensuite aux terres et aux bêtes que les peuples ont su maîtriser avec le temps. Une nature dont ils tirent une grande partie de leurs ressources et qui influe sur leurs traditions ancestrales. Ainsi, la fête nationale du Naadam permet aux Mongols de mesurer la rapidité de leurs chevaux lors de courses à travers la steppe. Au pays de Gengis Khan, cet animal sert de moyen de transport et procure l'airag, fameuse boisson de lait de jument fermenté. Au Vietnam, la déesse des eaux fait partie de toute fête populaire. Il faut dire que les cours d'eau offrent au pays trois mannes nourricières: le riz, le poisson et les innombrables fruits qui mûrissent sur les berges.
L'Asie est une et multiple. Diverse dans ses ethnies, ses langues, ses religions et ses traditions, elle est unique lorsque les rires se mêlent à l'étonnement devant le voyageur à la peau et aux yeux si clairs.
Ses habitants possèdent la même aptitude à partager, le désir de connaître cet ailleurs encensé, le sens de l'esthétisme et des couleurs, et une volonté farouche de survivre.
Parfois, cependant, le rêve oriental cède la place à des valeurs universelles nettement moins estimables. Le culte du dollar se substitue à celui des dieux, la frénésie des mégapoles remplace la vie paisible de quartier, l'individualisme l'emporte sur la solidarité. À Pékin, certains quartiers ont été rasés pour accueillir les sportifs des Jeux Olympiques qui se dérouleront en 2008! Ironie... On détruit les traces du passé pour un événement qui prit racine dans une civilisation plusieurs fois millénaire. Au nom du développement, une Asie est en train de disparaître. Les images de Régis Colombo ne sont pas seulement une ode à la beauté, elles sont également un témoignage nécessaire.
C'est sur un coup de tête que je suis partie en Asie un beau matin d'août, pour plusieurs mois, avec dix-sept kilos de bagages et un billet de train me permettant de traverser l'Europe et de sillonner l'Asie. Et si je ne connaissais pas la raison profonde de mon départ, c'est à mon retour que je l'ai découverte. Une aventure humaine inoubliable, où l'on apprend beaucoup sur les autres et encore plus sur soi-même.